« Elle veut un Venezuela libre » : la Prix Nobel de la Paix María Corina Machado réapparaît à Oslo, après 11 mois de clandestinité
L’opposante vénézuélienne María Corina Machado est réapparue ce jeudi matin en public à Oslo pour la première fois depuis près d’un an, après avoir manqué la veille la cérémonie de remise de son prix Nobel de la paix pour ses efforts pour la démocratie dans son pays.
María Corina Machado est arrivée dans la nuit au Grand Hotel, où descendent habituellement les lauréats du Nobel, et a salué les quelques dizaines de partisans en liesse qui scandaient « libertad ! » (« liberté ! ») dans la rue. Elle prévoit de donner une conférence de presse à Oslo dans la matinée.
¡Oslo, aquí estoy! pic.twitter.com/tsixUerj0q— María Corina Machado (@MariaCorinaYA) December 11, 2025
La réapparition de l’opposante a lieu en pleine crise entre le Venezuela et les États-Unis, qui ont déployé depuis août une imposante flottille en mer des Caraïbes, et ciblé des embarcations censées transporter de la drogue, causant 87 morts. Le président vénézuélien Nicolás Maduro accuse Washington de vouloir le renverser pour s’emparer du pétrole de son pays.
María Corina Machado, bête noire de Maduro, est critiquée par certains pour la proximité de ses idées avec celles du président américain Donald Trump, auquel elle a dédié son Nobel, et soutient ce déploiement américain. Donald Trump a annoncé mercredi la saisie d’un pétrolier au large des côtes du Venezuela. L’opposante de 58 ans vit dans la clandestinité au Venezuela depuis août 2024, soit quelques jours après la présidentielle à laquelle elle avait été empêchée de participer.
Mercredi, c’est sa fille Ana Corina qui a reçu en son nom le prix et a lu pour elle un discours de remerciements. Le comité Nobel a évoqué « un voyage en situation de danger extrême » pour justifier l’absence de la lauréate, avant de confirmer son arrivée dans la nuit de mercredi à jeudi.
« Elle risque d’être arrêtée si elle rentre »
La précédente apparition publique de María Corina Machado remontait au 9 janvier lors d’une manifestation à Caracas. On ignore comment l’opposante a réussi à quitter le Venezuela, où la justice la recherche pour « conspiration, incitation à la haine et terrorisme », et comment elle compte faire pour éventuellement y retourner. « Elle risque d’être arrêtée si elle rentre, même si les autorités ont fait preuve de plus de retenue avec elle qu’avec beaucoup d’autres parce qu’une arrestation aurait une portée symbolique très forte », a expliqué Benedicte Bull, spécialiste de l’Amérique latine de l’Université d’Oslo.
Maria Corina Machado a quant à elle assuré dans sa première prise de parole, auprès de la BBC, qu’elle avait bien l’intention de retourner dans son pays. « Bien sûr que j’y retourne, a déclaré Maria Corina Machado. Je connais exactement les risques que je prends. »
Elle rentrera « très bientôt, elle veut vivre dans un Venezuela libre, et elle n’abandonnera jamais cet objectif », avait laissé entrevoir un peu plus tôt sa fille, Ana Corina Sosa Machado. Le prix Nobel de la paix a été attribué à María Corina Machado le 10 octobre pour ses efforts en faveur d’une transition démocratique au Venezuela.
« Pour avoir la démocratie, nous devons être prêts à nous battre pour la liberté », a dit mercredi sa fille dans le discours lu à l’Hôtel de ville d’Oslo, en présence de nombreux membres de la famille de la lauréate, du président argentin Javier Milei et d’autres chefs d’État latino-américains de droite. Évoquant les arrestations, les tortures et la chasse aux opposants, elle a fustigé « des crimes contre l’humanité, documentés par les Nations Unies » et « un terrorisme d’État déployé pour étouffer la volonté du peuple ».
Les États-Unis, l’Union européenne et de nombreux pays d’Amérique latine refusent de reconnaître les résultats de la présidentielle de l’an dernier, qui a permis au socialiste Nicolás Maduro d’enchaîner un troisième mandat de six ans. L’opposition accuse le pouvoir de fraude et a revendiqué la victoire de son candidat, Edmundo Gonzalez Urrutia, aujourd’hui en exil et présent à Oslo mercredi.
Le comité Nobel a exhorté le président vénézuélien à quitter le pouvoir. « M. Maduro, acceptez les résultats de l’élection et retirez-vous », a lancé son président Jørgen Watne Frydnes sous des applaudissements nourris.

